86 ans de service, 48 ans de 3 étoiles… les générations se succèdent, le prestige et les goûts demeurent. Rencontre avec César Troisgros, le fils de Michel, prêt à perpétuer la légende de cette Maison, véritable institution de la cuisine française.

Michel et César Troisgros à Roanne dans le département de la Loire

Quand on porte un nom comme Troisgros, est-on forcément prédestiné à devenir cuisinier ?

César Troisgros : Non, parce qu’on a le choix de faire ce qu’on a envie. Ma sœur, par exemple, travaille dans un tout autre domaine. Jeune, j’ai souhaité m’orienter vers autre chose puis j’ai pris le temps de réfléchir, de discuter avec mon entourage et j’ai réalisé que j’aimais cuisiner et que j’aimerais en faire mon métier. Etre né dans cet univers fait forcément naître des envies mais l’évidence n’était pas là, il s’agit d’un choix personnel que j’ai tardivement mûri.

Dans la cuisine, qu’est-ce qui vous lie à vos aïeux et votre père ? Qu’est-ce qui vous distingue ?

César Troisgros : Les cuisiniers Troisgros partagent un palais aiguisé, lié à une éducation fine aux goûts culinaires. Nous partageons également une même philosophie du métier de restaurateur : un esprit familial qui place l’accueil du client au coeur de notre démarche. Quant au « style Troisgros », il a évolué mais garde un fil conducteur : on travaille de nombreux condiments pour proposer une cuisine qui reste très vive et légère. De la continuité en perpétuelle évolution, c’est un peu notre marque de fabrique dans la mesure où nous remettons constamment en question notre cuisine.

Quel a été votre parcours ? Quel rôle jouez-vous aujourd’hui au sein de la Maison Troisgros ?

César Troisgros : Une fois ma décision prise, je suis entré en formation dans une école hôtelière, à l’Institut Paul Bocuse. Puis j’ai fait mes armes dans différents établissements de renom. À Paris chez Michel Rostang puis en Espagne à Gérone pour les frères Roca, un 3 étoiles parmi les meilleurs restaurants du monde. J’ai également pas mal voyagé aux Etats-Unis et au Brésil. Ces expériences sont l’occasion de tester des schémas de travail différents avec des choses à réutiliser ici en France. Faire ses preuves à l’étranger est un challenge mais aussi la promesse d’un grand enrichissement. J’avais prévu de partir travailler au Japon mais l’actualité à Fukushima à ce moment-là m’en a empêché. Une situation qui m’a conduit à trouver ma place peut-être plus tôt que prévu dans la Maison Troisgros. J’ai commencé en 2008 dans les cuisines de la Colline du Colombier, notre établissement à Iguerande. Puis j’ai intégré les cuisines de Roanne, gagné en responsabilités. Aujourd’hui, je suis très engagé aux côtés de mes parents et le bras droit de mon père en cuisine.

Quel est votre premier souvenir en cuisine ?

César Troisgros : C’est assez insolite… j’avais 4-5 ans et j’étais fasciné par ces cuisiniers qui cassaient les carcasses de canard avec un couteau batte, pour en faire de petits morceaux puis une sauce. Sur une grande planche près du garde-manger, mon grand-père me faisait essayer sous son regard vigilant et les mains bien accrochées au couteau !

Si on vous dit Roannais, quelles saveurs avez-vous en tête ? Quels sont vos lieux coups de cœurs en Roannais ?

César Troisgros : Je pense au fromage charolais : un fromage de chèvre fabriqué dans la région, de forme cylindrique. L’intérêt c’est que ce fromage en cache plusieurs : frais, on déguste une pâte très douce, peu salée ; puis en séchant, la pâte devient très cassante et les saveurs dégagent beaucoup de caractère. On le mange comme ça, on l’intègre également dans des recettes. Côté territoire, j’aime beaucoup le massif des Bois Noirs, une petite chaine montagneuse entre les vallées de Roanne et de Clermont-Ferrand. J’aime y faire du sport ou cueillir des champignons, c’est parfait pour souffler. Quant au centre-ville de Roanne, vous nous y retrouverez, mon père et moi, tous les vendredis matins de bonne heure pour le marché, avec nos producteurs fidèles.

La Maison Troisgros s’apprête à déménager…

César Troisgros : Nous partons à quelques kilomètres de Roanne mais déjà à la campagne. Les travaux sont en cours et l’établissement devrait ouvrir au printemps 2017. Entre un manoir bourgeois, une partie fermière et un espace contemporain, ce lieu sera multiple mais cohérent. Un nouveau site pour continuer à faire vivre l’esprit Troisgros et m’épanouir pleinement dans cette Maison.

Gabriel

Auteur

Gabriel

Curieux et toujours à la recherche de nouvelles sensations, je multiplie les expériences. J'aime autant partir à la rencontre des grands de la gastronomie Roannaise que m'intéresser au patrimoine du territoire.

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